Le mercredi 24 août 2005 à 10 h 36, rue Saint-André-des-Arts à Paris, nous avons introduit deux euros dans un distributeur automatique, et quelques instants plus tard tombait dans le bac un exemplaire des Fleurs du mal. Rappelez-vous : «Ma pauvre muse, hélas ! qu'as-tu donc ce matin ?/Tes yeux creux sont peuplés de visions nocturnes/Et je vois tour à tour réfléchis sur ton teint/La folie et l'horreur, froides et taciturnes».
Profitant de la torpeur estivale et de l'exode des Parisiens , un spécialiste du bouquin à bas prix (Maxi-Livres) a installé dans la capitale une demi-douzaine de distributeurs automatiques de livres. Le Parisien rentre de vacances, met deux sous dans le bastringue et attend sa barre chocolatée. Au lieu de quoi, c'est du Baudelaire qu'on lui fourgue. Il proteste. Il a tort. La distribution automatique de littérature est le signe que l'humanité continue d'embrasser l'avenir. La machine Sélecta est un nouvel horizon gorgé de chewing-gums, de capotes et de poésie. C'est la mer allée avec le soleil ! Car Maxi-Livres a choisi l'entreprise Sélecta pour la fournir en distributeurs. Les machines sont identiques à celles qui, dans les cafétérias, nous délivrent ces appétissants en-cas. Les marchandises sont insérées dans les spires d'un serpentin hélicoïdal en acier. La monnaie fait tourner le dispositif de telle sorte que les aliments soient relâchés dans le vide pour venir s'écraser quelques dizaines de centimètres plus bas. Toutefois, Maxi-Livres n'a pu se rési