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Libération
Critique

Heil Arthur

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Une uchronie géographique transporte le national-socialisme en Angleterre.
publié le 15 septembre 2005 à 3h41

Une encoche faite avec l'ongle du pouce sur le mur des toilettes publiques pour homme. «Une traînée de marques du même genre court à travers le mur du box : elle représente de nos jours ma vie sexuelle tout entière.» Geoffrey Brook, sexagénaire professeur à Oxford, donne ainsi rendez-vous à sa «relation». On ne connaîtra jamais son nom. On sait seulement qu'il s'agit d'un homme marié, père de deux filles, qui assouvissait la libido de Brook, dans une société qui considère l'homosexualité comme déviante. Ils ne se verront plus dans l'obscurité de la cabane de jardin. L'amant a été arrêté avec femme et enfants, et emmené vers une destination inconnue. «Elle était juive, figurez-vous», renseigne une voisine.

Ian MacLeod, dont ce premier roman traduit en français est une pure découverte, ne s'appesantit pas. Et pour cause. Derrière son personnage vieillissant, se dessine à gros traits un régime politique familier, à ceci près qu'il se situe outre-Manche. Uchronie géographique pourrait-on dire. Philip K. Dick, avec le Maître du Haut-Château, a traité de même la Seconde Guerre mondiale, imaginant la victoire des puissances de l'Axe et l'occupation des Etats-Unis par les Japonais. Dans les Iles du Soleil, La Grande-Bretagne a perdu la Première Guerre mondiale, puis s'est enfoncée dans la crise et le chômage. Nous sommes en juin 1940 et la désormais «Très-Grande-Bretagne» est dirigée par le héros providentiel qui a sorti le pays du désastre, John Arthur. Dès son arrivée au pouvoir en