Menu
Libération
Critique

La mort en ce jardin

Article réservé aux abonnés
Le Brésilien Bernardo Carvalho réinvente les tristes tropiques de sa propre histoire.
publié le 15 septembre 2005 à 3h41

Il existe bien des façons de ne pas raconter sa vie. Le Brésilien Bernardo Carvalho a choisi la fiction. Elle entretient des relations clandestines avec son expérience. Bien entendu, elle ne guérit de rien. L'an dernier, Mongolia dérivait d'un voyage effectué en Mongolie (Libération du 25 novembre 2004). Cette année, Neuf nuits danse sur les cendres vivaces de l'enfance et des ancêtres de l'auteur, sur leur expérience intime de l'Amazone.

Le roman a été écrit et publié au Brésil avant le précédent, en 2002. On y trouve des thèmes et des manières de conter propres à Carvalho : une quête dans laquelle les personnages et le récit s'enferrent ; une narration gigogne, où chaque recherche ouvre sur des découvertes et de nouveaux personnages qui n'annoncent rien, sinon des pressentiments et de nouvelles recherches ; une manière à la fois enfantine et intellectuelle de s'enchanter par la construction des mystères qui l'angoissent, d'autant plus qu'ils ne seront jamais éclaircis ; enfin, une mélancolie face à la destruction de plus en plus rapide du monde par les hommes.

Neuf nuits pourrait s'intituler Amazonia, tant on y est, ou Tristes tropiques, si le titre n'était déjà pris. Tout est magique, méandreux, hostile, et pourtant comique. Comme Aguirre, le lecteur remonte l'histoire en radeau, à la recherche d'un El Dorado qui n'existe que parce qu'on le cherche ; c'est suffisant pour aller au bout du monde ­ et du livre. Comme l'écrit un personnage, «le rêve des uns est la réalité des a