Un grizzli, un sphinx, un loup. Une éminence, un samouraï, un Raminagrobis. Un Citizen Kane, et même un François Mitterrand. Voilà le portrait de Claude Durand, éditeur à Paris depuis 1958, tracé par ses amis et ses ennemis. Tout lui va. Ce qu'il ne veut pas, c'est devenir «un marronnier».
Le marronnier pousse dans les cours d'école et dans les journaux. Ses bonnes feuilles tombent à l'automne. Claude Durand, ancien instituteur, fait sa rentrée littéraire en publiant un Houellebecq qui laisse ses confrères marron. Stop ! Ne pas filer la métaphore, fuir la facilité, aller au vif du sujet. Combien d'auteurs ont vu leur copie raturée, annotée, renvoyée, Claude Durand est un éditeur intraitable, presque maniaque. Il écrit en pattes de mouche, pour ajouter au bestiaire.
Pourquoi François Mitterrand ? «Il a la culture du secret et cloisonne tout, les gens et les choses», dit François Samuelson, agent littéraire de Michel Houellebecq et apporteur d'affaires. Citizen Kane, à le voir trôner, costume noir et crinière blanche, dans son nouveau bureau du cinquième étage de l'immeuble Fayard, on comprend. «Sauf qu'on ne connaît pas le Rosebud», précise Jean-Marc Roberts, directeur de Stock et ancien bébé Durand. Chercher du côté de Livry-Gargan, banlieue rouge de l'ancienne Seine-et-Oise, dans le pavillon d'une famille française aussi banale que son patronyme. Pas de résistant héroïque, pas d'artiste, pas d'engagements politiques. Un père employé chez Kodak, une mère au foyer et cinq enfan