Menu
Libération

L'âge d'oraison

Article réservé aux abonnés
publié le 22 septembre 2005 à 3h47

Vous étiez écrivain ou poète, bravo. Mais vous venez de mourir, désolé. Voici venue l'heure d'un premier test de votre postérité : par la plume du ministre de la Culture, ou plus sûrement celle d'un de ses conseillers, la Nation va-t-elle se fendre d'un hommage ? Avez-vous laissé derrière vous une «oeuvre considérable» et la littérature «orpheline» ?

Les grands noms peuvent mourir tranquille. Apprenant la disparition de Claude Simon en juillet, le ministère de la Culture taillait son oraison dans l'ébène : «Ses livres sont pour nous la preuve vivante, désormais immortelle, de ce dépassement de soi qu'est la littérature.» Trois semaines plus tôt, rayon balsa, Larry Collins avait hérité d'un maigre : «Ce témoin de notre temps était surtout un ami de notre pays» (le journaliste américain vivait à Ramatuelle). La semaine dernière, la dépouille de Vladimir Volkoff trouvait rue de Valois une plume compatissante, quoique fatiguée : «Si Volkoff était de cette lignée d'hommes de lettres à peu près à l'aise dans tous les genres, il a véritablement excellé dans le roman.»

Les noms plus obscurs ont du souci à se faire : s'apercevra-t-on de leur absence ? Le poète occitan Bernard Manciet, bien que mort, peut se considérer comme miraculé, lui dont le décès en juin fut salué par un lyrique : «Son verbe haut et son tempérament de feu ne manqueront pas seulement à Sabres, sa ville natale si bien chantée dans cet "enterrament" qui, paradoxalement, nous le rendra toujours vivant» (fine allusion