«Je n'ai jamais pu disposer de moi, à cause de cette malheureuse mélancolie...» Si Søren Kierkegaard était bien «le plus aigu questionneur de l'âme avant Freud», on imagine qu'il a pu questionner la sienne, d'âme, et y déceler fêlures, ecchymoses ou échardes. Il gardera toujours caché le chiffre de son existence, mais livrera son «espèce de folie», avant que biographes, psychiatres et psychanalystes ne se penchent sur son «cas», pour diagnostiquer qui une «défaillance sexuelle», qui une «personnalité schizophrénique», une névrose obsessionnelle ou une mélancolie, en effet. Scellée par une «note secrète», obérée par le poids d'une «croix» que le péché de son père lui a fait porter, torturée par l'amour volontairement rendu «impossible» pour son éternelle fiancée Régine Olsen, la vie de Kierkegaard, si elle n'explique pas toute sa philosophie, semble s'offrir d'elle-même au regard du clinicien. Aussi, ouvrant Lacan et Kierkegaard, s'attend-on tout naturellement à découvrir une énième analyse, freudo-lacanienne, du penseur danois. Il n'en est rien. L'ouvrage de Rodolphe Adam, certes pointu et parfois agaçant (1), réalise un extraordinaire travail théorique, auquel la psychanalyse ne se tient pas toujours lorsqu'elle pense que l'essentiel est de rapporter des «études de cas», de reconstituer sa propre histoire ou de se «justifier» devant les attaques des neurosciences ou des mille psychothérapies à succès: il fait s'entre-choquer les concepts de la pensée de Lacan et de celle de
Critique
L'objet K de Lacan
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par Robert Maggiori
publié le 29 septembre 2005 à 3h53
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