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Libération
Critique

Sarfati, états d'Amérique

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La jeunesse américaine rencontrée à domicile.
publié le 13 octobre 2005 à 4h04

«A quoi penses-tu ?», demande-t-on en vain à ceux qui vous échappent. Les personnages de la Vie nouvelle, dernier livre de la photographe Lise Sarfati, sont beaux de leur jeunesse (ils ont entre 15 et 20 ans) et pleins d'une intériorité qui rendrait déplacée la question. Une fille en rouge, les cheveux longs et roux, les yeux masqués, les bras graciles, sort d'un coffre-fort Herring Hall Marvin Safe co. Quelques pages plus loin, c'est encore elle, mais blonde, visage de poupée, sans lunettes, cigarette entre les doigts. Le chandelier à sept branches est toujours là, la porte du coffre-fort est fermée. Légende pêchée en fin d'ouvrage : Sloane #34. 07.10.2003 Oakland, California.

En 2003, Lise Sarfati a effectué deux séjours de deux mois aux Etats-Unis. Elle a parcouru en voiture plusieurs Etats (Texas, Géorgie, Caroline-du-Nord, Oregon, Californie...), avec l'idée de photographier des êtres humains dans des paysages, et non pas séparés comme dans ses travaux précédents en Russie. Mais, au bout d'une semaine de voyage, elle a bien dû constater qu'elle n'avait fait aucune rencontre : «Le seul moment où j'ai vu des gens, c'est quand j'ai pris de l'essence. Là-bas, c'est de la science-fiction, il n'y a personne. La géographie des Etats-Unis est très simplifiée. Les Américains se contentent de rouler de leur maison à leur lieu de travail ou au supermarché. Alors je me suis demandé : comment je vais pouvoir voir des gens. Et la seule manière, c'était d'aller chez.»

La photographe fra