Menu
Libération
Critique

Holmes, sweet Holmes

Article réservé aux abonnés
Premier tome des aventures du détective british en édition bilingue.
publié le 27 octobre 2005 à 4h16

Plus que les déductions ébouriffantes et l'humeur singulière du colocataire du Dr Watson au 221 B Baker Street, ce qui envoûte le lecteur, souvent jeune, des enquêtes de l'inusable détective, c'est l'atmosphère inquiétante, quasi surnaturelle, dans laquelle celles-ci se déroulent. Une explication de ce charme singulier né sous la plume de sir Arthur se dégage de la biographie de l'écrivain qu'on aurait tort de négliger. Elevé de manière très puritaine et sportive dans un collège de Jésuites, le garçon découvre Londres en 1874, à l'âge de 14 ans : la vision d'un décor nappé de brouillard, la lueur des becs de gaz, les silhouettes des cabs filant par les rues boueuses de la capitale marquent son imaginaire comme la morgue de Paris avait frappé Wilkie Collins. Il écrit à sa mère : «J'ai visité la Chambre des horreurs de Madame Tussaud avec un effroi délicieux.» Les dés sont jetés.

Douze ans plus tard, le jeune médecin sans pratique de Southsea amorce la mise en scène d'un théâtre d'ombres dont les toiles peintes et les effets spéciaux grand-guignolesques doivent énormément à ses premières impressions de Londres. Mais ne nous emballons pas : la première aventure de Sherlock Holmes, qui fait suite à la rencontre de celui-ci avec Watson, ne sacrifie encore que partiellement à ce qui deviendra par la suite le rituel et, du même coup, tiendra en permanence le lecteur sous hypnose, mystifié mais conquis. C'est que Conan Doyle subit encore l'influence du romancier français Emile Gabori