Le temps n'a pas été juste avec Sébastien Castellion (1515-1563). Ni le sien où, en pleine Réforme, le sale caractère, une humilité altière et le penchant à ne pas transiger sur les principes en ont fait un ennemi chez les protestants mais pas un ami des catholiques, ni les quatre siècles et demi séparant la parution de son grand oeuvre une des premières traductions en français de la Bible et la seconde édition de celle-ci, précieuse à plus d'un titre, paraissant aujourd'hui. De cette véritable météorite, ne restaient jusqu'à présent que six ou sept exemplaires de par le monde. C'est tout le paradoxe saisissant de l'entreprise et du destin de Castellion : sa Bible, il l'avait adressée au plus grand nombre, pour tout dire aux incultes mais elle ne fut lue que par les clercs, docteurs et théologiens de tous bords, qui la réfutèrent pour mieux la refuser et, au final, la faire disparaître. Voulant élargir le petit cercle des initiés et des spécialistes, la deuxième édition intégrale, sans toucher à la syntaxe, a modernisé la ponctuation et, en partie, l'orthographe tout en entourant cet écrin du français et de la religiosité de l'époque des guerres de religion par d'opportunes préfaces, notes et commentaires.
Issu d'un milieu de petits paysans peu lettrés, Sébastien Castellion (ou Chastellion, Châteillion, Châtillon, Castalion...) naît en 1515 dans un village du Bugey, territoire entre Lyonnais et Savoie que François Ier s'apprête à conquérir. Depuis la thèse monumentale