Même s'il ment parfois, ou se dupe lui même, l'Amour ne peut pas ne pas dire: j'ai le plaisir de ton plaisir, je suis heureux de ton bonheur et malheureux de tes malheurs. La Méchanceté, qui s'avoue rarement telle, dirait plutôt: je jouis de ta souffrance et je suis heureuse de ton malheur. L'Envie, elle, est malheureuse du bonheur de l'autre, réel ou supposé, et se torture éternellement de n'avoir pas ce qu'il a, de ne pouvoir faire ce qu'il fait, de n'être pas ce qu'il est. Plus perverse, la Jalousie fait le mal et se fait mal à tenter d'exterminer tout désir qui désirerait l'objet de son désir. La Vengeance, singeant la justice, répond au mal par le mal, le reçoit décuplé, le rend au centuple et s'enferme dans le jeu infernal d'où nul ne sort jamais vainqueur. La Rancune et la Rancoeur se savent malades du temps, et voudraient, en vain, que le mal qu'elles ont reçu se distille chaque jour dans le coeur de celui qui le leur a donné. Et la Haine? La haine, elle ne dit rien. Semblable en cela à l'amour, elle n'a pas de vocabulaire propre, autre que celui, extrême et proche de la désagrégation, que lui offrent tantôt le silence glacial tantôt le cri et la vocifération. Elle s'exprime et se «fait porter» par les métaphores de toutes les autres formes de malveillance, qu'elle accompagne et derrière lesquelles, ne voulant jamais apparaître «pure», elle se cache: la fielleuse malignité, l'envie haineuse, la jalousie haineuse, l'aversion haineuse, la rancune haineuse. Elle ne parl
Critique
Pourquoi tant de haine.
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par Robert Maggiori
publié le 12 janvier 2006 à 20h02
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