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Libération
Interview

Quand François Fejtö l'a connu.

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publié le 12 janvier 2006 à 20h02

L'intellectuel, journaliste et historien hongrois Ferenc (François) Fejtö, réfugié en France depuis 1938, a beaucoup fait pour casser l'image de «poète du régime» qu'ont voulu donner d'Attila Jozsef après sa mort les communistes hongrois aux ordres de Moscou. Il était d'autant plus habilité à le faire qu'il fut son ami. Avec Pàl Ignotus, ils avaient fondé en 1934 la revue Sszép Szo (on traduit par arguments mais en hongrois cela désigne aussi les belles paroles). Fejtö et Ignotus ont raconté leurs souvenirs de leur ami dans des livres aujourd'hui introuvables. Fejtö, 96 ans, se souvient.

«Béla Bartok collaborait à la revue. Il était déjà très connu, en 33 il avait interdit à l'Allemagne de jouer ses oeuvres. Il faisait partie d'une commission d'intellectuels européens dirigée par Paul Valéry venu à Budapest en même temps que Thomas Mann. Ce sont des auteurs que l'on publiait dans notre revue qui a été la première à traduire Sartre. Un jour, Bartok a dit à Attila Jozsef qu'il était à la poésie hongroise ce que lui était à la musique. Ce fut sans doute le jour le plus heureux de sa vie.

Quand je l'ai connu, c'était un communiste idéaliste, très plongé dans la littérature marxiste ­ les Allemands venaient de publier les écrits du jeune Marx, ceux d'un philosophe héritier de la grande tradition allemande, de Hegel. J'étais en prison quand Attila Jozsef m'a annoncé qu'il ne pouvait plus rester avec les communistes car le PC allemand avait reçu l'ordre de Moscou de marcher avec les