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Critique

Etre persane

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Une Iranienne découvre la solitude à Paris.
publié le 19 janvier 2006 à 20h06

Dans le passé récent de Roxane, il y a un événement qui s'est déroulé à Ispahan et qu'elle veut oublier. Dans son passé familial, il y a Pacha Khân et les montagnes de l'Azerbaïdjan iranien. Roxane est la petite-fille de Pacha Khân, qui a fait ses études à l'école française de Tabriz et «parlait "parissii", ce qui voulait dire "parisien" en turc azéri». Roxane, elle, ne parle pas un mot de parisien quand elle débarque à Paris. La première révélation de sa nouvelle vie se produit au supermarché. «Au Monoprix de l'avenue du Général-Leclerc, elle éprouva, pour la première fois, ce sentiment intime et irréfutable : elle était du tiers-monde... Le terme tiers-monde s'applique à ces pays où, dans le meilleur des cas, deux épiceries (... ) subviennent aux besoins de la population de tout un quartier. Et une personne du tiers-monde est une personne qui (...) perd la consistance même de son être la première fois qu'elle franchit la porte d'un supermarché.» Pour le reste, elle découvre le Luxembourg, où elle s'installe pour lire «des dimanches entiers» et les cafés, où elle dévore son sandwich «en un clin d'oeil, comme on dit en persan, et en français aussi, apprit-elle plus tard» et voit un homme se pencher sur une femme et lui faire «un baiser dans le cou... tout était comme dans un roman». Elle obtient un permis de séjour avec une facilité miraculeuse, il ne lui reste «qu'à se faire une vie». Dans sa chambre de bonne, elle lit Omar Khayyâm, tout en voulant «devenir une autre en fra