Un peu abscons, le titre intrigue : l'Histoire des avant-dernières choses. Serait-ce un ouvrage qui, constatant ou contrastant la fin de l'histoire, mesure, décrit, discute le temps qui reste ? Ou bien vu la personnalité de son auteur, grand intellectuel de la République de Weimar rescapé du nazisme serait-on face à l'une de ces nombreuses tentatives de fixer un monde avant qu'il s'effondre, ou de le sauver de son engloutissement après le désastre ? Il y a de cela, mais en diagonale et comme à contrecoeur, puisque Siegfried Kracauer, qui n'a jamais eu ni la fibre ni l'approche historienne de la réalité (1), a consacré l'essentiel de ses écrits au cinéma, à la photographie, au roman policier, bref à des genres sans passé et qui étaient pourtant en train d'inventer le futur. Aussi cet ouvrage inachevé, paru en 1968, deux ans après sa mort, n'est-il pas un livre de mais sur l'histoire et tout d'abord sur la substance même qui doit être la sienne aux yeux de Kracauer, le monde de la vie quotidienne, le Lebenswelt. C'est justement cela le monde des avant-dernières choses : les dernières ou si l'on veut les premières étant les Idées, apanage des philosophes, voire des théologiens. Inclassable, cette entreprise se propose néanmoins de réhabiliter, en partie, les modes de pensée des historiens, praticiens et théoriciens, d'en condamner certains et d'en discuter d'autres, pour faire de l'histoire un domaine intermédiaire, à égale distance de la philosophie et de la science mais p
Critique
La ligne Siegfried
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publié le 23 février 2006 à 20h26
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