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Libération
Critique

Leur main à couper

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Qu'en était-il réellement des «Atrocités allemandes» commises lors de l'offensive d'août 1914?
publié le 23 février 2006 à 20h26

En août 1914, l'entrée de l'armée allemande en Belgique et dans le nord de la France suscita une immense émotion. Les alliés dénoncèrent d'emblée les «atrocités» auxquelles se livraient les soldats allemands : pillages, incendies, viols, exécutions sommaires, mutilations et «mains coupées». Berlin récusa tout en bloc, parlant de mensonge et de propagande grossière. En résulta un lourd conflit mémoriel, dont les effets et les enjeux débordent très largement l'histoire de la Première Guerre mondiale.

Le livre de John Horne et Alan Kramer apporte sur cette question des éclairages décisifs. Au terme d'une exploration minutieuse des archives militaires, il établit d'abord les faits de façon indiscutable. Oui, l'armée allemande fut bien responsable d'exactions lors de l'invasion de la Belgique et de la Lorraine. Plus de 400 «incidents» sont attestés, la destruction de 15 000 à 20 000 bâtiments et la mort de 6 417 civils. A Tamines (380 tués), à Louvain (248 tués, 15 % des édifices brûlés dont la prestigieuse bibliothèque universitaire), à Dinant (674 morts, 400 déportés), à Namur, Arlon, Lunéville ou Saint-Dié, des unités allemandes incendièrent, saccagèrent et tuèrent des civils. Surtout, ces «atrocités» ne peuvent en aucun cas être comprises comme des réactions aux embuscades de francs-tireurs et aux «actes infâmes de la population belge», comme le prétendit l'état-major allemand.

Ce constat, bien sûr, ne suffit pas, et le livre s'attache à saisir les raisons de cette violence, au