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Libération
Critique

Jelinek plus ultra

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Un pamphlet antiguerre, ventriloque et explosif de la Nobel 2004.
publié le 16 mars 2006 à 20h38

Face à la guerre, nous. Représenté (e) s par une folle totale qui campe seule en scène en faisant toutes les voix, tous les récits, et les bruits, à toute vitesse, en les mixant, en les hurlant à la face du monde, et se foutant de la gueule dudit. C'est Bambiland, un one-woman show comique d'Elfriede Jelinek, Nobel de littérature, sur Bush et Blair en Irak. Bambiland, écrit au printemps 2003, a été créé au Burgtheater en décembre de la même année. Si d'aventure, Alain Françon et Dominique Valadié avaient envie de recommencer, au profit de la polyphonie de Jelinek, le même genre de mise en lecture qu'ils avaient faite pour les textes de Christine Angot à Théâtre Ouvert en 1999, les lecteurs français diraient merci.

Le génie de Jelinek est de se mettre devant la télé. Nous sommes les citoyens de cet Occident qui a envoyé dans le désert «l'armée bardée d'or» (Eschyle, une des voix de Bambiland), mais nous sommes d'abord des téléspectateurs. «A peine à la maison, déjà nous allumons l'image. ça doit fonctionner. Et ça fonctionne. Instantanément. Elles ne partent jamais sans laisser de trace, les images de notre divinité à nous, les images que nous voyons là, que nous sommes les seuls à voir, là sur l'écran lumineux. Voilà, nous éloignons ce peuple de sa foi, en échange nous lui donnons enfin notre image, et terminé. Et c'est très bien comme ça et c'en sera vraiment fini de ce peuple, qui n'a aucune notion du primat de la personne, car un peuple sans personnes individuelles, ça n'e