Visages épluchés comme une banane, les traits roulés dans des replis de viande agrafés par du métal ; viscères éruptifs, fouaillés, dans des cavités rouges, par des mains de cire... Les photos chirurgicales du Coeur sacré, serties d'obscurité, comme des gemmes, ont un effet sidérant. On y voit la nudité intérieure du corps et l'abolition irrémédiable de la personne. Les légendes nous révèlent-elles que la plupart de ces images concernent des opérations thérapeutiques, menées sur des patients vivants, que le scandale intime de ce dépouillement radical en semble aggravé...
La boucherie, ici, est pourtant domestiquée par la chorégraphie des instruments chirurgicaux, et des mains soignantes : une instrumentalité concise, cernée dans la théâtralisation d'un saint des saints rétréci, émergeant d'un écrin de ténèbres. La dimension esthétique de ce spectacle en aiguise encore la connotation dramatique. L'effet de tunnel renvoie au sentiment de l'origine du monde. Au vrai, cette vision ne correspond pas à la «réalité» des salles d'opération, éclairées a giorno. Elle dérive d'une contrainte technique : la pellicule, saturée par l'intensité des réflecteurs chirurgicaux (les lampes scialytiques installées au-dessus de la table d'opération), élimine l'éclairage ambiant.
Californien d'origine latino, Max Aguilera-Hellweg était déjà un photoreporter chevronné quand une commande l'a conduit à photographier sa première intervention chirurgicale, en 1989. Cette rencontre a bouleversé sa vie : à