Depuis l'affaire Battisti, dans laquelle elle a ardemment occupé les avants postes de la défense, on se demandait un peu où Fred Vargas en était, de la fiction. En avril, sa proposition de cape en plastique pour s'isoler du virus de la grippe aviaire (Libération du 4 avril) nous apparut comme un bon signe. On était certes en pleine réalité, mais on percevait le lutin blond de nouveau en ébullition quasi artistique, toute à son affaire de santé publique qui la ramenait à ses passions pour l'archéologie et l'histoire des hommes, celles-là mêmes qui irriguent son oeuvre : la chercheuse spécialiste en ossement animal à l'époque médiévale imaginait une parade au H5N1 avec la même fièvre minutieuse qui l'a précédemment menée à établir le vecteur des grandes épidémies de peste (les puces des rats). Dans les bois éternels, son dixième roman, achève de convaincre que loin d'avoir laissé trop de plumes dans la bataille, la Vargas pète la forme.
A un moment du livre, à peu près à mi-course, un enquêteur lâche sur fond de déroute policière : «Au fond, si on regarde le tout, ce n'est parti que d'un chat torturé par des gosses.» Mais non. Il y a effectivement un chat émasculé dans l'histoire, mais dans notre souvenir, tout part de Jean-Baptiste Adamsberg, le commissaire fétiche de Vargas, qui a trouvé des résidus de terre sous les ongles de deux gars retrouvés égorgés à la porte de la Chapelle, à Paris. Dès lors, le double meurtre qui avait toutes les apparences du deal mal négocié prend a