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Libération
Critique

C'est encore loin, l'Amérique.

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En dépit de quelques similitudes, les banlieues populaires françaises ne sont pas des ghettos à l'américaine. Un essai de sociologie comparée, par Loïc Wacquant.
publié le 1er juin 2006 à 21h39

Est-ce à cause de son nom quelque peu canadien, est-ce parce qu'il enseigne la sociologie à l'université de Berkeley en Californie ou que ses livres sont souvent traduits de l'anglais, qu'on se figure Loïc Wacquant en élève américain de Pierre Bourdieu ? Or, il est montpelliérain d'origine, tout comme il est héritier des plus légitimes de Bourdieu, autant porté à délimiter méthodologiquement ses champs de recherche qu'à labourer empiriquement le terrain de ses enquêtes, toujours soucieux de décentrer son point de vue selon les principes de la sociologie comparative. Parias urbains. Ghetto, banlieues, Etat tire en effet sa force de deux immersions proprement ethnographiques que Wacquant a réalisées d'un côté et de l'autre de l'Atlantique au début des années 1990 : à La Courneuve, en banlieue parisienne, et dans le South Side, le plus grand ghetto noir de Chicago. C'est d'ailleurs dans un club de boxe de cette ville, où il terminait un doctorat, qu'il a compris combien pour lui la sociologie n'est en rien une discipline feutrée mais s'apparente plutôt à un sport de combat, engageant le chercheur en un corps à corps aussi bien avec la réalité sociale que les interprétations qui peuvent l'occulter ou en donner raison.

Adossé à ces enquêtes, Parias urbains. Ghetto, banlieues, Etat ne prend évidemment pas en compte les émeutes de fin 2005 dans certaines communes de la ceinture parisienne. Cela ne semble pas troubler plus que ça Loïc Wacquant, puisque, de toute façon, les temps de l