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Libération
Critique

La vraie vie d'Yvonne Vera.

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Ultimes textes de l'écrivain du Zimbabwe morte en 2005.
publié le 1er juin 2006 à 21h39

Quand, il y a un an, Yvonne Vera a succombé des suites d'une méningite, c'est une des voix les plus singulières de l'Afrique anglophone qui s'est éteinte. Née en 1964 au Zimbabwe, «la fille de la township» avait acquis une reconnaissance internationale. La BBC World Service lui avait consacré deux heures d'émission sous le titre Une femme de Bulawayo. Grâce à son roman Sous la langue, elle avait obtenu le Prix des écrivains du Commonwealth pour l'Afrique en 1997. C'est ce roman précédé d'un autre roman court, Une femme sans nom, qui vient compléter la traduction de son oeuvre en français.

Comme dans les autres livres de Vera (Papillon brûle, 2002 et les Vierges de pierre, 2003, même éditeur), les figures centrales sont des femmes. Des femmes aux prises avec le mythe et l'Histoire qui les subliment (Nehanda, son premier roman non traduit, a pour sujet l'héroïne du XIXe siècle, symbole de la lutte anticoloniale), et une société patriarcale qui les opprime. Si on peut parler de féminisme ce n'est pas dans un sens littéral, chez Vera rien de militant, le désir d'indépendance suffit à exprimer le combat et la seule description des faits vaut toutes les dénonciations. La femme revêt le visage de l'humain, l'humanité face au bourreau sans visage.

Violences politiques de l'ancien régime rhodésien ségrégationniste ou de la présente dictature de Robert Mugabe (les Vierges de pierre racontait les massacres dans le Matabéléland), mais aussi violences sociales : infanticide, viol, inceste.