Menu
Libération
Critique

Vichy et la question

Article réservé aux abonnés
Comment le commissariat général aux Questions juives fixa la ligne antisémite du régime pétainiste.
publié le 8 juin 2006 à 21h44

Depuis les travaux de Serge Klarsfeld, Michael Marrus et Robert Paxton, la politique antisémite du régime vichyste ne constitue plus un mystère. Certains points, toutefois, restaient dans l'ombre, la place du commissariat général aux Question juives (CGQJ) notamment, malgré l'étude pionnière ­ mais par là même datée ­ de Joseph Billig. Il fallait de toute évidence revenir sur les lieux du crime, démarche suivie par un jeune chercheur, Laurent Joly.

Le rôle dévolu au CGQJ justifie cette longue enquête. Cette administration, créée par l'amiral Darlan en mars 1941, devait tout à la fois proposer des lois censées régler «la question juive», coordonner l'action des ministères chargés de les appliquer et veiller à l'aryanisation des biens. Les résultats, pourtant, ne répondirent pas aux espérances. Décidé à défendre la souveraineté française, le premier commissaire, Xavier Vallat, s'attira les foudres de l'occupant ; son successeur, Darquier de Pellepoix, bien qu'à la botte des nazis, déploya un activisme brouillon qui, déplaisant à Pierre Laval et irritant ses protecteurs, conduisit à son limogeage en février 1944. Dans l'ensemble, cependant, le commissariat joua un rôle déterminant, en fixant la ligne antisémite du régime, en conduisant l'aryanisation, en permettant également à des administrations parfois rétives d'invoquer son autorité pour mieux se défausser des cas problématiques ou embarrassants.

Le CGQG s'acquitta sans sourciller de cette mission. Certes, ses quelque 2 500 em