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Libération

Cézanne ouvre-toi.

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publié le 15 juin 2006 à 21h26

Le centenaire de la mort de Cézanne est l'occasion pour Grasset de rééditer sa Correspondance, dont l'édition critique semble au demeurant bien démodée. Le principal correspondant du peintre, c'est Emile Zola. Les deux garçons se sont connus au début des années 1850 au collège Bourbon d'Aix-en-Provence. Le futur peintre est né en 1839, le futur écrivain en 1840. Jusqu'en 1858, il n'y a pas de trace écrite de leur amitié, mais c'est l'année où la mère de Zola retourne à Paris avec son fils et les échanges de lettres commencent. L'affection se lit dans le ton et Cézanne bombarde son camarade de vers de plus ou moins mirliton et de parodies de poésie latine. Il se moque de lui-même passant son bac et le ratant (puis le réussissant), de ses infernales mais éphémères études de droit : «Hélas, j'ai pris du Droit la route tortueuse./ ­ J'ai pris, n'est pas le mot, de prendre on m'a forcé !/ Le Droit, l'horrible Droit d'ambages enlacé/ Rendra pendant trois ans mon existence affreuse.» Mais on sait que ce n'est en définitive pas au droit que Cézanne consacra sa vie. Zola est le premier à l'inciter à peindre et se propose en intermédiaire quand M. Cézanne père, banquier, fait jouer l'argument financier pour dévier son fils de sa route.

L'amitié ne se dément pas au fil des années, loin de là. Cézanne demande à Zola de conserver par sécurité une copie de son testament. Peu à peu, le succès survient à l'écrivain, mais pas au peintre qui s'obstine à vouloir être présent à l'officiel Salon