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Libération
Critique

Peur sur la ville

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Un roman à l'atmosphère lourde et poisseuse, avec une cité pour héroïne.
publié le 21 septembre 2006 à 23h22

Comme dans Parlez-moi du troisième homme, le premier livre de Llop traduit en français (en 2005), on a l'impression que le premier sujet de ce roman, son personnage principal, pres-que, c'est l'atmosphère. Ici encore, elle est étrangement présente, dense, lourde, mystérieuse, elle est une représentation de la complexité et de l'opacité aussi bien des sentiments que des enjeux politiques. Dans cette ville méditerranéenne cosmopolite et non nommée, «il pleut souvent, et la pluie est poisseuse et chaude», on croise des personnages menaçants, opaques, puissants,la police découvre un labo où on trafique «des organes provenant des républiques de l'Est», l'eau atteint des prix astronomiques, de mystérieux cadavres apparaissent dans les eaux du port, les attentats et incendies sont quotidiens, on a le sentiment qu'une catastrophe a eu lieu et que d'autres vont venir, «il s'agit de s'échapper sans même savoir à quoi on échappe».

Carlos Orfila Klein, le narrateur, est un homme de 42 ans qui, de manière obsédante, sous prétexte d'une émission de radio, fait parler des hommes et des femmes de la génération de ses parents et de ses grands-parents. «Je suis un intervieweur de vieillards. C'est pourquoi mon émission s'appelle la Morgue.» Ces vieillards «ont perdu leur chitine et leurs élytres et leur carapace et ne vivent plus que des souvenirs de leurs parties molles».

Ce roman construit sur une atmosphère et des images est aussi une sorte d'