On sait tellement que les Mille et Une Nuits relèvent avant tout de la littérature orale, on en a tellement entendu parler, tellement vu de prétendues images au gré d'adaptations cinématographiques diverses qu'il y a comme une bizarrerie à pouvoir les lire dans leur intégralité (la traduction suit l'édition Bulaq, Libération du 23 juin 2005). Et la profusion orientale dont on nous a rebattu les oreilles, celle de l'or et des pierres précieuses, s'efface devant une autre profusion, celle des récits (près de 300 contes). Et, à l'intérieur des récits, cette confiance aveugle faite au récit lui-même facilite la tâche du trompeur, puisque les autres personnages sont comme les lecteurs, à croire ce qu'ils lisent ou qu'on leur raconte. Dans le Conte du roi 'Umar an-Nu'mân..., dans le premier volume, la fourberie de l'infâme Shawâhî Dhât ad-Dawâhî s'exerce ainsi sur un nombre exagéré de pages. Mais les notes du volume, qui relèvent comme manquements à la vraisemblance ceux à la logique interne du récit, donnent par ailleurs carte blanche au conteur pour inventer n'importe quoi, richesses hors du commun ou voyages dans les airs avec les démons. Un des effets de la lecture proprement dite des Mille et Une Nuits est de constater que le fameux suspense censé tenir mille fois le lecteur et Sharâzâd en haleine (sera-t-elle tuée ou non ce soir ?) apparaît juste comme un gimmick n'apportant aucune inquiétude. La nuit est seulement une unité narrative du conte, ma
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