Dominique Viart est professeur à l'Université Lille 3, spécialiste de la littérature contemporaine, co-auteur avec Bruno Vercier de La Littérature française au présent (Bordas, 2005), et co-directeur de la Revue des Sciences Humaines. Il répond à quelques questions sur le prix Goncourt décerné à Jonathan Littell pour les Bienveillantes.
Quel intérêt accordez-vous aux prix littéraires?
Relativisons: les prix n’expriment jamais, au mieux, que les préférences esthétiques de leur douzaine de jurés. Eux-mêmes soumis d’ailleurs à toutes sortes d’influences: éditeurs, stratégie commerciale, opinion publique, pression médiatique, amitiés, connivences et complicités –ou antipathies– du milieu littéraire. Ils couronnent souvent une œuvre correctement réussie de la littérature grand public, qui n’est sans doute pas la plus exigeante, la plus troublante, ni la plus difficile du moment: ce n’est pas pour rien que ces jurys s’appellent aussi des «académies»… Disons que leurs lauréats sont le plus souvent de bons artisans de la littérature, pas toujours des artistes cependant.
Mais ils ont parfois du bon: d’abord parce qu’ils font largement parler de livres, et parfois même de littérature, quand les débats ne sont pas hélas recouverts par les questions d’influence, de tractation ou de commerce. Il est bon aussi qu’un Prix Goncourt (en veine de relégitimation?) signale l’œuvre de Pascal Quignard au grand public, même s’il lui faut pour ce