A une recognition approfondie de sa vie et de son oeuvre, Pierre Vidal-Naquet avait déjà procédé avec les deux volumes des Mémoires, parus au Seuil/La Découverte en 1993 et 1995, ou, plus succinctement, dans le Choix de l'histoire chez Arléa en 2003. D'ailleurs, il faudrait dire ses vies et ses oeuvres, puisqu'on a affaire, avec Vidal-Naquet, non pas à un seul itinéraire mais à de nombreux chemins qui se croisent, se touchent, s'éloignent, dessinant, plus que des lignes de fuite, des rencontres, des luttes et des travaux où s'est affirmée jusqu'à sa mort toute la singularité d'un homme pluriel et heureux de l'être. Posthume, en partie inachevé, L'histoire est mon combat, livre d'entretiens avec Dominique Bourel et Hélène Monsacré, déploie à nouveau cette manière insoumise de cohabiter d'un historien de la Grèce ancienne avec celui de l'époque contemporaine, du militant anticolonialiste avec l'engagé pour la vérité dans l'histoire, celle des hommes mais aussi celle de la discipline, du juif assimilé luttant pour les droits des Palestiniens et remontant sans cesse aux sources de l'histoire juive tout en restant athée et républicain comme son père mort à Auschwitz avec sa femme en 1944.
Pierre Vidal-Naquet est mort en juillet dernier, à 76 ans, sans avoir relu L'histoire est mon combat qui, de ce fait, en devient plus émouvant et garde une étonnante fraîcheur, comme d'une parole vivante, dans le déploiement libre des affects, l'amour qu'il porte à ses