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Libération
Critique

La semaine anglaise

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Le bonheur conjugal, les plaisirs de la cuisine et de la chirurgie, sur fond d'angoisses post-11 septembre. Rencontre à Londres avec Ian McEwan, 58 ans, auteur de «Samedi».
publié le 30 novembre 2006 à 0h17

Londres envoyée spéciale

«Quelques heures avant l'aube, Henry Perowne, neurochirurgien, se réveille en pleine activité, déjà en position assise et repoussant la couette avant de se lever d'un bond... Sans l'avoir décidé ni voulu, il se dirige vers la plus proche des trois fenêtres.» C'est la première phrase du livre. Sans l'avoir décidé ni voulu, et sans en avoir pris conscience, le lecteur est quasi instantanément arrivé trois pages plus loin, entraîné par une prose qui réussit à faire ressentir simultanément le tempo tranquille du bonheur quotidien et la tension urgente de la menace qui plane. Le lecteur comprend très vite qu'Henry est un homme heureux, parfaitement heureux, comme on en rencontre rarement dans les romans, et qui se précipite de manière inéluctable (comme porté par un tapis roulant trop rapide) vers un événement, dont tous les signes avant-coureurs nous sont montrés sans qu'on les comprenne.

Nu devant sa fenêtre, Henry voit un avion à la trajectoire bizarre. Il imagine un acte terroriste, «le personnel de bord terrifié se raccrochant à quelques vagues souvenirs de la procédure d'urgence, l'odeur omniprésente des excréments... Près de 18 mois, déjà, ont passé depuis [...] que la silhouette innocente du moindre avion de ligne s'est mise à générer de nouvelles associations d'idées [...], les avions en vol évoquent désormais des oiseaux prédateurs ou courant à leur perte».

Le sujet de ce roman est simple : un samedi ordinaire dans la vie d'un homme t