Jean-Marie Le Pen est-il non pas «président d'un parti politique, mais chef d'une bande de tueurs» ? Un «vampire qui se nourrit de l'aigreur de ses électeurs» ? Hier, la Cour européenne des droits de l'homme ne prétendait pas répondre à ces questions. Seulement juger si de telles formules relèvent de la liberté d'expression ou de la diffamation, comme l'a estimé la justice française. Pour ces traits mis dans la bouche des protagonistes d'un roman, le Procès de Jean-Marie Le Pen, Mathieu Lindon, écrivain et journaliste à Libération, ainsi que son éditeur, Paul Otchakovsky-Laurens (POL), ont été condamnés à 15 000 francs d'amende chacun (environ 2 300 euros) et à verser 25 000 francs (3 800 euros) de dommages et intérêts au président du FN. Même peine pour Serge July, alors directeur de la publication de Libération, pour avoir publié une tribune dans laquelle 97 écrivains se disaient solidaires de Mathieu Lindon et reprenaient ces formules. Condamnations confirmées en appel et en cassation.
Devant la grande chambre de la Cour européenne, Me Roland Rappaport a rappelé le contexte. En février 1995, un colleur d'affiche du Front national abat froidement un jeune d'origine comorienne à Marseille. Le 1er mai, des skinheads jettent un jeune Marocain dans la Seine. Il se noie. «Qui a dit que Le Pen profère des mots qui tuent ?» s'est exclamé Me Rappaport, citant le Comité épiscopal des églises en 1996.
Pour Libération, Me J