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Interview

Chantier ouvert au public

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La «politique de l'esprit» selon Wolf Lepenies. Entretien.
publié le 19 avril 2007 à 7h17

Comment vous définiriez-vous ?

J'ai du mal à me considérer seulement comme un sociologue. J'ai fait de la sociologie et je l'enseigne, je suis donc sociologue de profession, mais historien par inclination. Je me considère plutôt comme un auteur, quelqu'un qui aime faire des livres. J'ai conduit des recherches sur l'histoire naturelle, écrit un essai sur Buffon et, bien sûr, publié des livres de sociologie. Actuellement, je travaille sur Auguste Comte et l'art visuel à Paris au milieu du XIXe siècle. Je n'ai travaillé que sur ce qui m'intéressait. J'ai pu le faire parce que j'ai été le directeur du Wissenschaftskolleg de Berlin. Ce poste demande d'être là toute la journée et, en même temps, donne une grande liberté intellectuelle.

Pourquoi la sociologie semble-t-elle avoir perdu sa superbe d'antan vis-à-vis des autres sciences humaines ?

Auguste Comte est celui qui, le plus clairement, a dit que la sociologie était le comble de ce que l'on pouvait atteindre au niveau de la compréhension des sciences. C'était une utopie, mais cette prétention a nui à notre discipline. Moi, je crois à une sociologie modeste qui sait bien où sont les limites de ce qu'on peut savoir du social. Pierre Bourdieu était lui aussi un immodeste, mais dans un sens que j'admire beaucoup. Il avait la conviction que la sociologie était à la fois une science et une pratique sociale, et il a lutté pour le démontrer. Je n'étais pas toujours d'accord sur ce qu'il voulait faire, mais il a eu le courage de ses opini