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Critique

Que Bergson ne bouge

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Médiatique avant les médias: la gloire d'un philosophe.
publié le 10 mai 2007 à 7h41

On ne sait pas s'il y a une philosophie de la mode, mais il est assurément des philosophies et des philosophes à la mode. Quand une philosophie l'est-elle ? Peut-être lorsque ce qui la désigne, par-delà ses différents courants ­ par exemple l'existentialisme, après-guerre ­ finit par désigner tout autre chose que de la philosophie, un style de vie, une façon de s'habiller, des objets, des boissons, des lieux, des danses, des chansons... Et qu'est-ce qui fait qu'un philosophe se trouve être, tout à coup, à la mode ? Il faut dire d'abord ­ le propre de la mode étant de durer une saison et de passer tôt aux oubliettes ­ que nul ne souhaite, normalement, n'être qu'un «philosophe-à-la-mode», sauf si l'on préfère être plus à la mode que philosophe, et que ce souhait eût été le même si on avait été chanteur, présentateur ou DJ. Mais si on le devient néanmoins, cela ne peut être dû, à notre époque, qu'à la constante «présence médiatique», des articles dans des magazines, la participation à des talk-shows, des émissions littéraires ou de variété, des débats de société... Dès lors, s'il gagne en «image» et en notoriété, le philosophe n'apparaît plus spécifiquement comme philosophe ­ s'il est sociologue, psychanalyste ou historien, cela ne change rien ­ mais plutôt, génériquement, comme «intellectuel». La posture d'intellectuel peut, dans les pires des cas, rogner celle de philosophe : au philosophe à la mode, on demande (et il accepte) d'intervenir sur tout, mais sur son oeuvre person