Si Pierre Mendès France a incarné une certaine idée de la République, au point de symboliser rigueur et exigence morale, il a peu gouverné, son passage au pouvoir se résumant à de brèves participations au second ministère Blum (1938) et au Gouvernement provisoire du général de Gaulle avant qu'il n'accède, pour sept mois et dix-sept jours, à la présidence du Conseil (1954-1955). Le volume qu'Eric Roussel consacre à PMF se penche au coeur de cette ambivalence qu'il s'efforce d'éclairer.
La carrière de Mendès débute sous de prometteuses prémices. Le jeune surdoué, vite enrôlé sous la bannière radicale, devient en 1932 député, avant de s'emparer en 1935 de la mairie de Louviers, puis d'obtenir en 1938 son premier maroquin. Embarqué sur le Massilia en 1940 et victime de l'arbitraire vichyste, il est jugé pour désertion lors d'une parodie de procès, mais parvient à s'évader, rejoignant l'aviation gaulliste et siégeant, à la demande du Général, comme commissaire aux Finances dans le gouvernement créé en Algérie. On sait qu'il rompit en 1945 avec de Gaulle, refusant la politique de facilité monétaire que prônait René Pleven. Faisant figure d'outsider au début de la IVe République, il fut, à la surprise générale, investi en 1954, à charge pour lui de sortir du bourbier indochinois que symbolisa l'effroyable défaite de Diên Biên Phu. Non content de mettre un point final à la guerre d'Indochine, il plaça la Tunisie sur les rails de l'indépendance et suscita en France un vaste mouvement