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Libération
Critique

Despotes allumés

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Quand les intellectuels voulaient conseiller les princes. Dernier tome de la saga de Badinter.
publié le 21 juin 2007 à 8h25

Ce dernier volet de la saga consacrée par Elisabeth Badinter aux intellectuels de l'époque des Lumières ne déçoit pas. L'auteur n'a pas son pareil pour restituer de façon captivante, sur un mode presque romanesque, les combats et les difficultés des encyclopédistes. Dans ce tome consacré à la période 1762-1778, l'intérêt porte sur le pouvoir, et plus précisément la relation ambiguë que les philosophes entretiennent avec les princes européens soucieux d'apparaître comme des «despotes éclairés». Nulle surprise, donc, à ce qu'aucune place ne soit faite au Contrat social, pourtant publié en 1762, et à Jean-Jacques Rousseau qui préfère «la société de ses égaux» à la fréquentation des Grands avec lesquels il n'y a «que des vices à gagner». Les vrais héros, parfois tragiques, de ce livre sont d'Alembert et Diderot, soucieux d'exercer une influence sur les rois en les convertissant à «la philosophie».

Les philosophes du XVIIIe siècle, à part Montesquieu ou Rousseau, se sont en fait peu intéressés à la théorie politique. L'écrasante majorité, même les plus radicaux comme d'Holbach ou Helvétius, considèrent la monarchie comme le régime le meilleur, car le plus naturel et, surtout, le plus efficace. C'est l'intolérance religieuse ou l'iniquité du système judiciaire qui est au centre de leur combat, comme en témoignent de grandes causes comme l'affaire Calas ou l'écriture d'ouvrages importants comme Des délits et des peines du Milanais Beccaria q