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Libération
Critique

«Cendrillon» Le carrosse des humiliés

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A travers trois personnages dérivés de lui-même et un autoportrait fantasmé, Eric Reinhardt, radical et puissant, décrit les piétinés de la classe moyenne et prêche l’évasion par l’instant et la littérature.
publié le 23 août 2007 à 9h18

La «réalité» est un manque d’imagination comme un autre, plus efficace que les autres. Il est possible de la refaire du dedans en imaginant les vies qu’on aurait pu avoir, plutôt les pires et plutôt goyesques, ça soulage, si l’on n’était pas devenu le peu qu’on est. Dans son quatrième roman, Eric Reinhardt y parvient. Il invente une parade puissante à ce que l’existence semblait promettre à l’enfant de la petite bourgeoisie et à l’adolescent étouffé qu’il fut. Mieux, il en joui  : son texte est souvent comique, parfois ­bavard, toujours instructif, labouré à la charrue et composé avec soin.

Cendrillon met en scène, alternativement, un écrivain nommé Eric Reinhardt et trois de ses «avatars synthético-théoriques  : des êtres imaginaires fondés sur les mêmes souvenirs ’'enfance et ’'adolescence que les siens, ou inspirés par eux. En Inde, les avatars sont les multiples incarnations des dieux. Les dieux sont joueurs, ils sont morts, ’'écrivain leur survit et il continue à se prendre pour ’'un ’'eux. Ce ’'est ni sans vanité, ni sans énergie. ’'écrivain rêve avec ces avatars. Il déploie en eux ses passions, ses fantaisies et ses peines. Ce sont des drapeaux ’'un drap un peu lourd qui flottent au vent du récit.

Fuite. Autour de lui, centre de gravité et mode ’'emploi incarné du livre, voici donc Laurent Dahl, avatar principal, trader multimillionnaire en fuite après avoir effectué une opération frauduleus  ; Patrick Neftel, obèse vivant avec sa mèr