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Critique

Tout en cadences

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Selon Pascal Michon, la politique est l'art d'organiser les rythmes.
publié le 13 septembre 2007 à 9h36

L'été, les Eskimo vivent dispersés, sont propriétaires de leurs armes, n'obéissent qu'à eux-mêmes, ne participent à aucune cérémonie collective ; dans la longue nuit de l'hiver, ils se regroupent à plusieurs familles par habitation, s'exaltent dans le chamanisme, mettent les biens en commun. Autre exemple: au IIIe siècle, les premiers moines vivaient seuls cinq jours par semaine, mangeant et priant quand ils voulaient ; la communauté se retrouvait le samedi après-midi et le dimanche pour prendre un repas en commun et prier, jusqu'à ce que, devenu religion d'Etat, le christianisme n'impose des règles de vie plus strictes.

Ou encore : en 1900, alors que les rythmes industriels pénètrent toute la société française , on note l'apparition, dans «les milieux scientifiques, politiques, artistiques ou commerciaux industriels», d'individus s'émancipant des rythmes collectifs. «Chacun se nourrit et travaille en fonction de ses nécessités propres sans suivre exactement les schémas cycliques et les routines qui s'imposent aux autres membres de la société.» Favorisés mais récusant les règles, bourgeois et déjà bohèmes : des bobos avant l'heure.

Agrégé d'histoire, ancien directeur de programme au Collège international de philosophie, Pascal Michon a déjà plusieurs ouvrages sur le rythme à son actif. Son objectif n'est pas de restituer les métamorphoses du rythme à travers les âges comme l'histoire des mentalités aurait pu le faire autrefois. Pour lui, comme en son temps pour H