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Critique

Nous deux

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Gilles Deleuze et Félix Guattari : l'histoire d'une pensée, l'aventure d'une époque, racontées par François Dosse.
publié le 20 septembre 2007 à 9h43
(mis à jour le 20 septembre 2007 à 9h43)

Au printemps 1972, un aérolithe s'écrase sur le continent du savoir et sur le monde politique», écrit François Dosse. Cette année-là, la France est encore soixante-huitarde et le pavé qui tombe du ciel ne ressemble à rien de connu : un ouvrage à deux mains, qui éreinte la psychanalyse alors au faîte de sa gloire et congédie la «structure» au profit du «devenir», avant d'énumérer une série de concepts aux énoncés aussi expressifs que déroutants : machine désirante, schizo-analyse, corps sans organe, codage/décodage. Les premières lignes de l'Anti-OEdipe sont un coup de poing : «Ça fonctionne partout, tantôt sans arrêt, tantôt discontinu. ça respire, ça chauffe, ça mange. ça chie, ça baise [...].Partout, ce sont des machines, pas du tout métaphoriquement : des machines de machines, avec leurs couplages, leurs connexions.» Trente-cinq ans plus tard, dans un monde devenu réseau de machines et de corps, toile géante, les premiers mots du duo prennent des allures de prophétie.

Avec Gilles Deleuze et Félix Guattari, biographie croisée, François Dosse, historien des idées, raconte l'aventure extraordinaire de deux penseurs qui, portés par le bouillonnement intellectuel des années 60, se trouvèrent chacun en trouvant l'autre. Deleuze : le philosophe aux poumons fragiles, souvent malade, mais dont ses maîtres prédisaient quand il avait 20 ans : «C'est le prochain Sartre.» Guattari : le psychiatre éruptif, dix idées