Günter Grass Pelures d'oignon Traduit de l'allemand par Claude Porcell. Seuil, 406 pp., 22,80 euro(s)
Pelures d'oignon, l'autobiographie de Günter Grass, est sorti en Allemagne il y a un peu plus d'un an, quelques jours après la publication par le Frankfurter Allgemeine Zeitung (FAZ) d'une interview titrée : «J'ai été membre de la Waffen-SS». Cet entretien, publié le 12 août 2006, a fait l'effet d'une bombe en Allemagne. Grass chez les SS, c'est autre chose que le philosophe Habermas ou le pape Benoît XVI dans les Jeunesses hitlériennes. Aussi bien parce qu'il y a une différence entre les quasi obligatoires Jeunesses hitlériennes et les redoutables SS. Et parce que Grass est à la fois un des plus fameux écrivains allemands contemporains et la «conscience de l'Allemagne» depuis cinquante ans. Comment cet homme qui incarne dans son pays la volonté de se confronter au passé nazi a-t-il pu faire silence sur son propre passé tout ce temps ? Sa réponse, dans l'interview au FAZ, tient en deux phrases : «[Avec mes romans], j'ai cru que j'en avais fait suffisamment, mais il restait cette tache résiduelle [...]. J'ai bien essayé de tourner autour du pot, mais le matériau brut était toujours là, il m'attendait en quelque sorte, et il a fallu que je l'affronte.»
Il l'affronte en écrivant un livre qui n'est pas un roman, mais qu'il n'appelle jamais autobiographie. Un livre où il décrit son enfance et sa jeunesse à Dantzig (aujourd'hui Gdansk en Pologne),