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Libération

Comme un collégien

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publié le 18 octobre 2007 à 0h53

Alors que s'abat sur nous un nouvel automne d'agitation vaine et confuse, de rhumes et de chagrins d'amour, le Collège de France a décidé d'organiser la résistance. Jeudi dernier, place Marcelin-Berthelot, à Paris, plusieurs centaines de militants se sont réunis vers 18 heures pour écouter des paroles de combat. Le professeur Roger Chartier prononçait la leçon inaugurale de sa chaire «Ecrits et cultures dans l'Europe moderne». Le grand historien du livre et de la lecture avait des choses désagréables à nous dire. Et nous ne voulions pas être consolés.

D'abord, que cela soit clair, Chartier n'appellerait pas à la lutte armée. Il se contenterait de montrer «quelle place a tenu l'écrit dans la production des savoirs, dans l'échange des émotions et des sentiments», du Moyen Age à nos jours. Il nous dirait comment hier, avec le livre, la pensée a pu s'incarner dans la matière, et comment aujourd'hui, avec le numérique et les écrans, elle est en train de foutre le camp, sable fin qui glisse entre les doigts. Il nous dirait comment apprendre à aimer un fantôme : le livre. Et nous ne voudrions pas.

Nous répondrions : «Dites donc, Chartier, déjà que le numérique a vidé nos maisons de nos photos et de nos disques, on ne va quand même pas se laisser piquer nos bouquins sans rien dire ? Même le pire des régimes totalitaires n'aurait rêvé d'un tel autodafé. Or voilà qu'au nom du progrès technique et du fantasme de la bibliothèque universelle, du marché triomphant et du bluff tech