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Libération

Doigt et moi

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publié le 25 octobre 2007 à 1h05

Le XXIe siècle hésite à commencer : il se demande si ça vaut la peine. Qu'ajouter aux précédents sinon quelques catastrophes accessoires ? Toutes les histoires n'ont-elles pas été racontées ? Et puis les gens sont lassés de faire et refaire les mêmes pitreries. Sauf Alain Robbe-Grillet.

Le dernier ouvrage du vilain barbu - Un roman sentimental, chez Fayard - est livré tel un coffre-fort sous une enveloppe de plastique, avec des pages brochées et un avertissement en couverture annonçant une «fiction fantasmatique qui risque de heurter certaines sensibilités». En guise de combinaison, ce conseil : «L'ouvrage n'étant pas massicoté, il est préférable, pour l'ouvrir, d'user d'un instrument coupant plutôt que de son doigt.» Sans doute la phrase de l'année. C'est un bon résumé du livre et un cadeau fait aux pauvres gens qui ont à en rendre compte.

«En habitué de la littérature interdite, a immédiatement noté Raphaël Sorin sur son blog, je sais que le majeur ne doit pas servir de coupe-papier ; on préfère le glisser ailleurs.» Sans compter qu'un livre massicoté au doigt finit tout cochonné. Dans le Point, Jacques-Pierre Amette notait dès avant parution : «Ceux qui ont eu le privilège de lire le livre ont constaté qu'effectivement le maniement du doigt, mais aussi l'usage d'instruments coupants, constituent un des thèmes majeurs de ce divertissement.» C'était un peu vendre la mèche.

La page 63 de ce Roman sentimental livre un bel i