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publié le 10 janvier 2008 à 1h53

Les Brèves de comptoir ont vu le jour à la fin des années 80, en même temps que les Deschiens, que la famille Groseille dans La vie est un long fleuve tranquille. C'était le temps de la mort des idéologies, l'adieu au prolétariat, la grande ségrégation des beaufs et des branchés, «une fièvre inégalitaire», pour reprendre le diagnostic d'Emmanuel Todd. Entre autres symptômes, la rupture a pris la forme d'une bonne blague, la mise en humour de la classe ouvrière. Ce fut l'avènement des blagues sur la bêtise crasse du peuple - un filon dont Canal + fit une exploitation industrielle. De cette ironie-là, les Brèves de comptoir furent la forme la plus épurée et la plus intense, où tout se résume à une seule idée, sublime, mais limitée : dans le rade le plus pourri de la ville la plus misérable, une étincelle peut jaillir, l'infini peut s'ouvrir.

Le succès fut au rendez-vous. Un tome par an de 1987 à 2000, un million d'exemplaires vendus, une intégrale en collection «Bouquins» vendue à 100 000 exemplaires, deux pièces de théâtre montées par Jean-Michel Ribes, un rendez-vous dans l'émission Palace (diffusée et reprise successivement par France 2, Canal, M6.). Au total, 30 000 vannes de bistrot, vérités de zinc, proclamations du petit noir, apophtegmes du dernier blanc, dont une sélection de 3 000 constitue ce tome anniversaire, «les plus foldingues, les plus dadaïstes», assure Jean-Marie Gourio, pêcheur de brèves en eaux profond