Inscrit en rouge sang de salarié dans le lettrisme d'un fameux fait divers (le meurtre d'une veuve dans sa villa de Mougins), le titre manifeste clame l'éclatante actualité de son objet dégénéré. Il est aussi un manifeste, dont une brève introduction dit la genèse en ces termes drôles amers : «Même s'il est à peine midi, l'auteur tient à se lever pour rendre un vibrant hommage aux valeureux journalistes du cahier Emploi de Libération dont il a illustré les terrifiants témoignages qu'ils ont ramenés du monde du travail, pendant près de dix ans, au péril de leur santé mentale.»
Chantiers.De 1999 à 2007, Vuillemin a dessiné dans ces pages ce qui s'avérera la «valeur» privilégiée du sarkozysme, dont l'élection appelait réédition. Ce voyage au bout de l'enfer salarié tombe à point : l'avancée des chantiers gouvernementaux, en matière de destruction de la fonction sociale du travail, fait de la caricature prémonition.
Le dessinateur ne prêche pas : son point de vue est libertaire, et l'ironie d'une cruelle noirceur. Ce qu'il observe, sans plus d'espoir de retour dans la jungle capitalistique, c'est moins l'aliénation (fataliste) du salarié, le zèle (cynique) du contremaître, la marche (bornée) de l'institution, que la conjonction du tout, pour mettre à jour l'absurdité d'un système qui, de quelque côté que l'on se situe du contrat de travail, formel ou implicite, ne «marche» pas.
Soit le personnage générique de Moulinot, archétype du galérien revenu de toute velléité d'