Cet homme aurait pu devenir président de la République haïtienne. A la chute de Baby Doc, en 1986, ils avaient été nombreux à le solliciter, le poète Aimé Césaire avait fait le voyage de la Martinique pour le convaincre. Mais Jean-Claude Fignolé a refusé. Son premier mandat politique est récent : cela fait huit mois qu'il est maire du village des Abricots (1 000 habitants). Entre-temps, cet ancien militant de gauche a été enseignant, journaliste, patron d'une distillerie de rhum et skippeur. «J'aime la mer : c'est ma première passion avant l'écriture.» Fignolé est aussi écrivain. Une heure pour l'éternité, son dernier roman, se passe en 1802, dans une île qui s'appelait encore Saint-Domingue. Il tourne autour de Charles Victor Emmanuel Leclerc, beau-frère de Napoléon Bonaparte et général révolutionnaire, en train de mourir de la fièvre jaune à Port-Républicain (aujourd'hui Port-au-Prince).
Trois voix. C'est alors qu'il terminait une biographie de Toussaint Louverture (le héros national haïtien, à l'origine de la première République noire du monde) que Fignolé a découvert le rôle de Leclerc et eu l'idée de ce livre. Depuis les Possédés de la pleine lune (Seuil, 1987), Fignolé avait écrit quatre romans et plusieurs essais. Avant encore, à la fin des années 60, il avait créé, avec les poètes René Philoctète et Frankétienne, le mouvement littéraire spiraliste. «C'était l'époque du nouveau roman et de la rupture avec la linéarité, on a mis ça en rapport ave