Lorsqu'il retrace son itinéraire, de son roman autobiographique, le Traître, à ses travaux sur l'écologie politique, André Gorz cite bien sûr Sartre, dont l'oeuvre a été pour lui «formatrice», Marx, Ivan Illich, Jean-Marie Vincent ou les théoriciens de la «critique du travail» tels que Frithjof Bergmann, Moishe Postone, ou Robert Kurz. Mais, entre deux développements sur la «sortie du capitalisme», il évoque immanquablement le nom de Dorine, sa compagne, «sans qui rien ne serait». La publication en 2006 de Lettre à D., histoire d'un amour (Galilée) a ému des milliers de lecteurs, en ce qu'elle exprimait avec force et pudeur cette idée toute simple que dans la traversée houleuse de la vie on ne «tient» que si l'on tient à quelqu'un et si quelqu'un tient à vous. Lettre à D. s'achevait sur ces mots : «Nous aimerions chacun ne pas survivre à la mort de l'autre. Nous nous sommes souvent dit que si, par impossible, nous avions une seconde vie, nous voudrions la vivre ensemble.» André Gorz avait 84 ans, Dorine un de moins. Ils se sont suicidés ensemble dans leur maison de Vosnon, dans l'Aube, le lundi 24 septembre 2007.
Aliénation. Ecologica, qui paraît aujourd'hui, n'est pas le testament intellectuel d'André Gorz. Le volume collige des textes déjà publiés dans des revues ou des ouvrages antérieurs mais peu disponibles. Le plus ancien («L'idéologie sociale de la bagnole») date de 1975, le plus récent («La sortie du capit