Récit
Jacques Chessex Pardon mère Grasset, 219 pp., 17,50 €.
Il n'est pas facile de demander pardon à ceux qu'on a offensés, surtout si on les aime, surtout quand ils sont morts. A l'été 1966, chez Marcel Arland, le jeune Jacques Chessex observe les remords de son hôte, «d'un fils qui ne s'occupe que de ses livres, de sa revue, de son ivrognerie, de sa carrière», en laissant mourir seule sa mère : «Je regarde cet homme souffrir d'aimer sa mère et se torturer du remords, toute sa vie, de lui avoir manqué. Au même instant, je me regarde souffrir de la même faute.» Quarante-deux ans plus tard, sept ans après la mort de sa propre mère, Chessex publie le bréviaire de cette souffrance, de cet amour et de cette faute. Portrait, prière, poème, élégie, confession à celle qui détestait la confession : le fils écrivain mélange tout, unit tout, rabâche tout. L'expiation de son amour ingrat a quelques vertus de style, mais aussi celle, plus rare, de ne le rendre ni sympathique, ni léger, ni pudique : narcissique en sa douleur, complaisant à lui-même jusque dans son autocrucifixion et ses regrets, il dit à peu près comme Cendrars : «Cette nuit, Maman, j'entre seul.» Mais il le fait plume et miroir en main. Ph.L.
Romans
Dmitri Bortnikov Furioso Editions MF, «Frictions», 190 pp., 12 €.
Après le remarqué Svinoburg (Seuil, 2005), voici le premier texte écrit directement en français par le Russe Bortnikov. Comme son nom l'indique, c'est un torrent, un bégaiement imme