Que d'histoires croustillantes il y aurait à raconter sur le monde de l'édition ! Heurs et malheurs, manies et marottes des auteurs, concours de m'as-tu-vu, stratégies secrètes, échanges de bons procédés, jeux de pouvoir, intrigues amoureuses, querelles, haines, népotisme, unions incestueuses entre critiques, directeurs de collections, attachés de presse, animateurs de télévision, éditeurs.
«Flèches». De ces anecdotes, qui n'ont au demeurant d'autre intérêt que celui de poivrer les dîners en ville à Saint-Germain-des-Prés, Eric Vigne pourrait faire recueil, si n'étaient son caractère, son esprit de sérieux et l'idée qu'il a de son métier d'éditeur (chez Gallimard). Aussi, dans le Livre et l'Editeur a-t-il fait tout le contraire (1). Un ouvrage sobre, où passion et raison s'équilibrent, au point que mêmes les «flèches» lancées ci et là sont comme épointées par les dispositifs argumentatifs. Un ouvrage non sur «ce qui se dit» dans l'univers éditorial, ni sur ce que tel ou tel de ses acteurs aurait à révéler de sa vie, ses «belles heures» ou ses fiascos, mais sur ce qu'il en est aujourd'hui de l'état de l'édition et du sort du livre. Un ouvrage - se présentant sous la forme de «réponses» à 50 questions d'un hypothétique lecteur - qui pose «livre» et «éditeur» en hypostases, et les rend ainsi aptes à être analysés tant du point de vue historique qu'économique, sociologique ou philosophique (on attend Bourdieu, un peu moins Kant, Deleuze, ou Wittgenstein !).
Par prope