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publié le 6 mars 2008 à 2h36

Histoire littéraire

Henri Thomas Carnets 1934-1948 Editions Claire Paulhan, 720 pp., 51 euros.

Si l'on y croit par tristesse, la poésie finit par rendre méchant envers le monde et soi-même : jour après jour, la vie arrache les plants d'images et de mots. Les carnets d'Henri Thomas, écrivain et excellent traducteur, établissent quotidiennement le constat de cette exigence et de cette amertume. On le dirait pris d'une perpétuelle rage de dent. S'y déroule une vie mise en perspective de grandeur et d'échec poétique, où chaque phrase crie ses douleurs et ses désirs : «Ma vocation, c'est d'être léger, de disparaître (anticiper sur l'inévitable) - et le seul travail qui s'accorde avec cette vocation est le travail poétique.» Mais il y a le reste : sa femme Colette qui devient folle, Antonin Artaud très au-delà des mots, la guerre à côté de laquelle Thomas semble passer par excès de souci de soi, les auteurs qu'il aime et ceux que, pour un moment ou pour toujours, il n'aime pas («Sartre est un phraseur vide - à la fois dépourvu d'ironie et de sympathie humaine ; je ne parle pas de poésie»). Le 26 novembre 1947, il écrit : «J'ai toujours eu tort lorsque je m'emportais ; ce n'était pas preuve de force, mais de faiblesse. Si je m'étais dominé, une grande partie de mon désarroi n'aurait pas existé.» Les carnets sont le journal de cet emportement et de ce désarroi.

Ph.L.

Barbey d'Aurevilly OEuvre critique III, les OEuvres et les Hommes, deuxième série (volume 1) Sous la d