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Libération
Critique

Pasolini action de grâce

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publié le 17 avril 2008 à 3h07

Ce n'est pas souvent qu'on tombe sur un poème de 600 pages. Une poésie frontale, claire, tout en prose. «Seulement une lumière simple et sensée, la lumière pleine des origines.» Mais c'est bien un roman, ce poème. Un roman d'une vitalité et d'une fluidité imposantes - Alberto Garlini a mis un pied dans la porte, et sa chaussure casse la baraque. Garlini pour qui le mot poésie ne veut peut-être pas dire grand-chose, puisqu'il ne voit que ça : elle est partout plaquée ; des paquets de belle glaise sur les murs, dans la crasse, entre les nuages, sur un ballon de football ou dans le regard noir de Pasolini, la bedaine hilare de Bertolucci. Cet auteur parmesan de 39 ans a publié de la poésie à ses débuts, aujourd'hui il l'occupe, c'est son pays, et on demande un visa, fissa.

«Coeur». En Italie, ce roman, le second de l'auteur, a dû claquer comme un large tambour. Majestueux frémissement quand le récit rend compte de l'histoire nationale, années 70 et jusqu'en 1991, avec des bouts de fiction ficelés autour, du parti pris, des inventions, des hypothèses fortes : Pasolini, cette espèce de Christ filmant, a-t-il mis en scène son propre assassinat, comme un sacrifice pour lessiver les péchés de l'Italie néofasciste ? Ou, carrément, pour absoudre l'humanité tout entière, cette idolâtre du consumérisme ? Ses assassins «le rouèrent de coups puis passèrent sur son corps avec sa propre voiture, une Alfa GT 2000. C'est alors que le coeur du poète explosa» ; et cette horreur aur