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Critique

Ils turbinaient à Urbino

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publié le 18 septembre 2008 à 5h04

L'historien Patrick Boucheron explore les points de recoupements de deux figures essentielles : Léonard de Vinci, l'artiste universel par excellence, et Nicolas Machiavel, l'inventeur de la raison politique. Ni fiction, ni biographie, Léonard et Machiavel est plutôt une méditation sur l'esprit de la Renaissance.

«Nous savons que les deux hommes se sont croisés, probablement à plusieurs reprises, entre 1502 et 1505. Leur rencontre n'a laissé que d'infimes traces dans leurs oeuvres respectives. Elle a pourtant bien eu lieu, et à un moment essentiel de l'histoire européenne. Les guerres d'Italie répandent dans les esprits le sentiment que le monde est en train de changer de base et, s'il y a une actualité à cette histoire, c'est peut-être l'idée que, quand tout nous désoriente et nous déçoit, le devoir de l'intellectuel est d'abord de nommer les choses avec exactitude. Ce que Léonard et Machiavel feront l'un et l'autre, à leur manière - en maîtres du réalisme.

«Cette histoire commence dans les Marches, aux confins de la Toscane et des Etats de l'Eglise. Là, des hommes nouveaux tentent de profiter de l'instabilité des temps pour se tailler un destin. Parmi eux, il y a César Borgia, fils du pape Alexandre VI, dont le nom incarne la promesse, ou la menace, du prince des temps nouveaux. En juin 1502, il s'empare du petit duché d'Urbino et s'installe dans le palais ducal, construit trente ans auparavant et considéré comme le plus beau palais du monde. Depuis cette base, il veut