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Libération
Critique

Pavés pas pris

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publié le 23 octobre 2008 à 6h51
(mis à jour le 23 octobre 2008 à 6h51)

Il y a plusieurs Régine Deforges, elle est comme tout le monde, jamais tout à fait la même, quoique changeant assez peu, fidèle à une idée entêtée de liberté et d'individualisme. Mais, ce qui n'est pas donné à tous, chacun des visages de Régine Deforges est fameux, lié à la bicyclette, au chocolat, au point de croix, à l'érotisme, à l'édition. Ces deux derniers aspects sont au centre d'A Paris au printemps ça sent la merde et le lilas, vers de Jehan Rictus approprié aux journées et aux nuits de mai. Ce petit livre bâclé, instructif et sympathique en diable, tiré à 20 000 exemplaires, est un pavé très personnel jeté dans la mare de 68.

Au mois de janvier, cette année-là, Hachette prend en diffusion le Con d'Irène, dont le titre devient, pour l'occasion, Irène. Pas de nom d'auteur sur la couverture, Aragon n'assumant pas la paternité de ce texte. L'éditeur en est Régine Deforges, à l'enseigne de l'Or du Temps, maison qu'elle a fondée avec Jean-Jacques Pauvert. Ce dernier, dans la Traversée du livre (Viviane Hamy, 2004) explique l'avoir créée pour elle. Deforges tient le rôle, second et ingrat, de la maîtresse encombrante dans les mémoires de Pauvert. Réponse de la bergère au berger, Pauvert devient l'amant anonyme d'A Paris au printemps. L'amant énonce de curieuses vérités : «Les écrivains sont des putes, les directeurs littéraires des sous-maîtresses, le seul patron, le mac, c'est l'éditeur.» L'amant aide la jeune éditrice inexp