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Libération
Critique

La démocratisation de l’incertitude

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Le cahier Livres de Libédossier
Futur. Daniel Innerarity explore les pistes pour remodeler le politique «après la désillusion».
publié le 13 novembre 2008 à 6h52
(mis à jour le 13 novembre 2008 à 6h52)

Deux entreprises croisées se déploient dans cet essai fort stimulant : celle de la refondation d’une morale et d’une politique de l’avenir et celle de l’esquisse d’une «chrono-politique».

«Construire l'espérance politique après la désillusion, la destruction de la naïveté et l'épuisement de la vieille idée de progrès» : c'est l'objectif que se donne Innerarity. Il n'est pas le premier à le formuler, car c'est bien dans ces termes que se pose depuis une trentaine d'années la question de la sortie du désenchantement démocratique contemporain. Il n'est pas le premier non plus à sonner vigoureusement la charge contre un «présentisme» qui rétrécit les existences et détruit insidieusement la vie publique. Il n'est toujours pas le premier à dénoncer le renoncement contemporain qui a substitué «le pessimisme de la gouvernance à l'euphorie de la planification», ou encore à stigmatiser «le triomphe de l'insignifiance dans les sociétés médiatiques contemporaines». Sur tous ces points, son essai n'a que l'avantage d'être écrit d'une plume élégante et aiguisée qui sait dire l'essentiel avec justesse et concision. On pourrait dire que c'est déjà beaucoup sur un sujet où se sont multipliés les ouvrages pâteux ou incantatoires.

Ressorts. L'originalité d'Innerarity est ailleurs. La pointe de sa démarche est de mettre l'accent sur la dimension proprement épistémologique de l'impuissance contemporaine. C'est notre incapacité à traiter et à penser l'ave