En privé, il y a quelques années, Alain Minc se vantait d'être réglé comme un animal de trait : «Je conçois à Noël, j'écris à Pâques, je corrige l'été.» A moins que ce ne fût : «Je conçois à Pâques, j'écris l'été…» En tout cas, la formule se voulait gage d'une sagesse personnelle, d'une saine distance à soi-même : «Moi, je ne me prends pas au sérieux, je ne suis pas comme ces théoriciens exaltés qui prétendent changer le monde.» Cette posture n'est elle-même que le revers nécessaire du principe de base de l'essai médiatique : «Moi, je n'ai pas peur de briser des tabous.» A travers ces deux règles se dévoile l'essence de l'essai médiatique : faire du bruit, oui, mais ne pas se mettre soi-même en danger.
Parmi les essayistes médiatiques, Minc récolte la palme de la constance. Depuis deux décennies, il revient chaque année avec un nouveau livre, un thème nouveau, des nouvelles «idées reçues» à abattre, de nouvelles émissions télé. Tel qu'il se rêve, Minc est un centriste tendance «mouche du coche», un Guide du petit futé des bonnes idées, avec des amis à droite et à gauche, tant que ceux-ci ne s'écartent pas du «cercle de la raison». Ses prises de position récurrentes dans le débat économique nous disent plutôt que c'est un conservateur, dont la seule excentricité est de ne pas supporter les autres conservateurs. Une Histoire de France en apporte la confirmation, qui, sous ses faux airs de libre promenade dans le récit national, est u