De l'après-guerre jusqu'au milieu des années 60, Joseph-Heinrich Darchinger fut photo-reporter dans son pays, l'Allemagne, et surtout en Rhénanie et à Bonn où il était né en 1925. Il avait donc 20 ans en 1945. L'âge de comprendre, après avoir été soldat dans la Wehrmacht nazie, d'où il venait et où il allait. Les premières images qu'il prend de cette Allemagne en ruines, à la fois coupable et victime, sont saisissantes. D'une part, parce qu'on y aperçoit, comme pour un violent retour en arrière, des visages, des vêtements, qui suggèrent plus l'Allemagne de la fin du XIXe siècle que celle des années 40. D'autre part et surtout, parce que ces clichés sont en couleurs. Darchinger travaillait comme laborantin dans un laboratoire photographique de Bonn qui avait vu arriver pour cause d'évacuation de la zone Est le meilleur de la technologie Agfa Color. Cette polychromie trouble parce qu'elle induit proximité et familiarité quand les habituelles archives en noir et blanc provoquent distance et étrangeté. En couleurs, la saleté est plus sale, la misère aussi. Une famille nombreuse pose devant une baraque de planches dans un lotissement de cabanons à la périphérie de Bonn (détruite à 30 % par un raid aérien en octobre 1944). Des petits garçons fouillent les gravats à la recherche de ferraille et de carton. Ces enfants sont si petits dans ces ruines immenses, que l'on pense inévitablement à Allemagne, année zéro que Rossellini tourna en 1947 dans les décombre
Critique
La Bonn époque
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par Gérard Lefort
publié le 11 décembre 2008 à 6h52
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